Le 14 décembre dernier, Luc Recordon a déposé une interpellation au Conseil des Etats qui portait sur la « pression croissante sur les étudiant-e-s ». Le but de cette interpellation était de soulever le débat sur la question de la santé des étudiant-e-s, principalement depuis l’entrée en vigueur de Bologne. Discutée le 21 mars dernier, l’interpellation a été liquidée. Le Conseil fédéral souhaite attendre quelques mois et également la publication de la prochaine enquête de l’OFS sur les étudiant-e-s prévue fin 2013, qui inclut des questions sur la santé, afin d’avoir des données plus concrètes sur la santé des étudiant-e-s.
Le lien entre application de Bologne et santé est intéressant et soulève plusieurs questions : que savons-nous de la santé des étudiant-e-s, physique et psychique ? La réforme de Bologne a-t-elle une influence, positive ou négative, sur l’état de santé des étudiant-e-s, mais également des professeur-e-s, chercheurs/euses, etc. ?
Il est souvent relevé que Bologne a rigidifié la structure des études. L’introduction, dans certaines hautes écoles, d’une durée limitée du temps d’études, l’organisation en paliers des cursus avec le passage au système bachelor/master ou encore l’introduction d’une propédeutique dans les études universitaires sont autant de modifications qui restreignent le cadre d’études, pour les étudiant-e-s mais également pour le corps enseignant. La thématique qui ressort de tout cela est celle de l’application de Bologne dans les hautes écoles ; en effet, un changement structurel ne peut se faire correctement sans un changement des méthodes pédagogiques et du contenu des enseignements. Les enseignant-e-s, sous pression également, ont-ils/elles eu le temps de repenser leurs cours en fonction du nouveau système ? Peuvent-ils/elles continuer à dispenser des enseignements de qualité ? Du point de vue des étudiant-e-s, le constat est alarmant : compacter une licence de 4 ans en 3 ans de bachelor, comme c’est souvent le cas par exemple, n’est pas pertinent et très difficile à réaliser pour les étudiant-e-s; n’oublions pas que plus de 75% des étudiant-e-s travaillent à côté de leurs études, que certain-e-s ont une charge de famille, des problèmes de santé et/ou sont indépendant-e-s financièrement. La charge de travail, qui a passablement augmenté, ne laisse que peu la possibilité aux étudiant-e-s dans ces situations de vie de pouvoir faire des études. Nous touchons ici à l’égalité des chances, qui est alors réduite pour les étudiant-e-s « non-lambda ». Le manque de flexibilité de certaines filières d’études, couplé à des erreurs de jeunesse dans la mise en conformité de certaines filières à Bologne, peut alors engendrer une détérioration des conditions d’études, qui se ressent ainsi sur l’état de santé des étudiant-e-s. Si nous n’avons plus de temps pour lire, pour faire du sport, pour avoir une vie sociale en dehors de nos études, pouvons-nous réellement suivre des études dans de bonnes conditions ? Le but est-il de mettre sa vie entre parenthèse le temps d’être formé-e ? Une formation peut-elle être suivie dans ces conditions ? Et surtout, devons-nous attendre des cas avérés de burn-out ou de maladies chroniques pour prendre des mesures ? J’espère que non.
Il est vraiment nécessaire qu’une étude soit réalisée sur la question de la santé des étudiant-e-s, au niveau national, afin de diagnostiquer les problèmes récurrents et de pouvoir sensibiliser les hautes écoles sur cette thématique, en leur offrant les moyens de trouver des solutions.
– Mélanie Glayre est membre du comité exécutif de l’UNES depuis mars 2013. Avant cela, elle a été co-présidente de la Commission sociale de l’UNES et co-présidente de la FAE (Fédération des associations d’étudiant-e-s de l’Université de Lausanne). Elle est étudiante en Master en Lettres à l’UNIL.
L’UNES publie régulièrement des blogs des personnes actives et alumnis dans la langue correspondante. Les contributions représentent l’opinion de l’auteur-e.