de: Virginie Lapaire, Co-Présidente de la commission d’égalité (CodEg)
Le genre au quotidien.
Le genre est un concept dichotomique complexe, utilisé notamment dans les sciences sociales. Le genre fait référence aux différences non biologiques (psychologiques, mentales, sociales, économiques, démographiques, politiques…) distinguant les femmes* et les hommes*. Dans la vie de tous les jours, le genre est, pour simplifier, un ensemble de normes qui définissent qui est une femme* et qui est un homme*. Ces normes évoluent (lentement) en parallèle avec la société . Mais pourquoi parler du genre au quotidien? En quoi le genre d’une personne est-il important ?
Pour voir à quel point les normes qui définissent le genre sont fortes, il suffit de jouer avec. La façon dont on s’habille, se coiffe, se maquille, est la première chose (et souvent la seule) que les autres perçoivent et nous jugent. Moi-même (genre : non merci ; de sexe biologique féminin), je choisis délibérément de transgresser les normes de genre. Je porte depuis plusieurs années les cheveux très courts et m’habille 90% du temps en jean’s /t-shirt/baskets, sans maquillage (pas féminin, mais tellement pratique). C’est mon apparence de base, celle sur laquelle les gens se basent pour interagir avec moi. Mais que ce passe-t-il quand je décide de m’habiller de façon plus féminine, si je laisse pousser mes cheveux ? Les regards changent. Des proches ou des collègues complimentent mes choix vestimentaires. Des inconnu-e-s sont plus souriant-e-s et serviables. Et moi je m’énerve de constater que les gens changent leur façons d’interagir avec moi à cause de mon apparence.
Les personnes transgenres, des personnes dont l’identité de genre est différente de leur sexe biologique, sont malgré elles en première ligne quand il s’agit de discriminations liés au genre, et pas seulement de la part de personnes rencontrées au quotidien, mais également de la part des autorités. Les personnes trans*, avant d’être officiellement autorisées à changer leur prénom et leur sexe sur leurs papiers d’identités, sont encore, dans la plupart des cantons suisses, forcées de subir au préalable des années de psychothérapie, une thérapie hormonale, diverses opérations de réassignation. Et c’est là que l’on voit la perversité des normes de genre : l’Etat définit ce qui fait une femme* ou un homme*. Une personne trans* ne désirant pas suivre de thérapie hormonale ou/ni subir d’opérations ne peut actuellement, en Suisse, pas faire changer son prénom et est condamnée à présenter des papiers officiels ne correspondant pas à son identité de genre. Elle sera de facto forcée de révéler son identité transgenre à de multiples reprises. Un article du NZZ Campus (http://campus.nzz.ch/politik/wenn-das-diplom-intimstes-offenbart) publié en janvier 2013 traite de cette thématique dans le contexte de la formation tertiaire. Les établissements tertiaires délivrent des diplômes selon l’identité officielle de chaque individu-e, mais certains établissements refusent même d’utiliser une autre identité à l’interne, ce qui peut s’avérer problématique au niveau des adresses mails et autres listes de présences à signer. Une personne transgenre* de devrait pas être forcée à révéler ou non son statut de trans* : c’est une décision personnelle.
Tout cela parce que la société définit chacun-e de ses membre comme une femme* ou un homme*, selon des critères strictes qui ne sont en fait pas applicables à un grand nombre d’individu-e-s. Dans la plupart de ces cas, comme le mien, ce n’est pas important, mais dans certains autres, quand la liberté d’autodétermination de chacun-e est remise en cause, cela devient problématique.
Virginie Lapaire suit la formation pour l’enseignement secondaire I à l’Université de Fribourg. Elle est l’une des co-présidentes de la Commission d’égalité de l’UNES.